Pierre Sabatier, président de Primeview, bien que prudent sur les perspectives des bourses, met en avant une thématique centrale pour les investisseurs : ce qu’il nomme les trusts. Ces entreprises d’une robustesse exceptionnelle, souvent assimilées aux « 7 magnifiques » aux États-Unis, représentent une opportunité unique sur les marchés actions. Pourquoi sont-elles incontournables ? Quels sont leurs attributs spécifiques ? Pierre Sabatier dévoile les clés pour comprendre cette thématique majeure qui n’est pas uniquement présente aux États-Unis.
Pour Pierre Sabatier, ces sociétés qu’il regroupe sous le terme de trusts ne constituent pas un secteur ou une zone géographique, mais un ensemble d’entreprises aux caractéristiques distinctives.
Ces sociétés se distinguent par leur taille imposante, une position dominante sur leur marché, ainsi qu’une trésorerie abondante. Cette dernière, synonyme de stabilité et de flexibilité financière, leur permet de naviguer sans encombre dans des contextes de taux d’intérêt élevés ou de marchés volatils.
Dans un environnement où les risques macroéconomiques sont nombreux, ces attributs confèrent aux trusts une résilience inégalée en bourse. Ils peuvent continuer à croître grâce à leur capacité à racheter des concurrents, renforçant ainsi leur avantage concurrentiel.
Aux États-Unis, les 7 magnifiques incarnent parfaitement cette thématique bien connue de ceux qui investissent en Bourse. Ce groupe inclut des entreprises comme Apple, Microsoft, Alphabet et Amazon, Nvidia mais exclut Tesla, qui ne répond pas aux critères de trésorerie. Ces leaders du marché affichent une croissance des profits impressionnante : +25 % prévue pour le deuxième trimestre 2024, contre seulement +5 % pour le reste du S&P 500.
Ces performances exceptionnelles sont à relier à leur modèle économique hautement rentable et leur capacité à capter les gains de productivité grâce à des avancées technologiques majeures. Ces entreprises exercent un effet d’attraction qui concentre les flux d’investissements sur un nombre réduit d’acteurs, amplifiant leur domination.
Si la thématique des trusts semble largement dominée par les entreprises américaines, Pierre Sabatier souligne qu’elle trouve également un écho en Europe. Des entreprises comme SAP, Hermès, ASML, Novo Nordisk, Inditex (Zara) et Airbus regroupées au sein de ce que Pierre Sabatier nomme l’indice « Shazan » illustrent cette dynamique. Bien que leurs capitaux soient plus modestes que leurs homologues américains, elles disposent des attributs nécessaires pour tirer parti de cette thématique : une rentabilité élevée, un positionnement stratégique et des ressources financières solides.
Malgré leur robustesse, ces trusts ne sont cependant pas à l’abri de subir des revers. Le principal danger réside dans un potentiel changement de règles du jeu par les politiques. Pierre Sabatier rappelle l’exemple de la Chine, où les interventions étatiques ont provoqué une chute de 60 à 70 % des marchés actions entre 2021 et 2023.
De même, l’histoire américaine offre des parallèles frappants avec la fin du 19ᵉme siècle, lorsque des mesures anti-trust ont entraîné des décennies de volatilité boursière. Toutefois, à court terme, aucun signal clair ne laisse entrevoir une remise en cause structurelle de ces entreprises phares.
Pierre Sabatier insiste sur l’importance de diversifier ses investissements. Si les trusts méritent une surpondération dans un portefeuille actions, ils ne doivent pas constituer l’unique thématique. Une allocation adaptée aux conditions macroéconomiques reste essentielle, intégrant d’autres classes d’actifs comme l’immobilier ou les obligations.
Acheter des trackers indiciels comme le S&P 500 permet d’exposer son portefeuille aux trusts, ces derniers représentant déjà près de 30 % de cet indice. Une stratégie encore plus offensive consisterait à augmenter leur pondération directe, tout en étant prêt à réagir rapidement en cas d’évolution réglementaire.
Pierre Sabatier rappelle que les trusts ne sont pas un simple effet de mode, mais une dynamique structurelle qui façonne les marchés. Dans un contexte incertain, ne pas inclure ces entreprises dans son portefeuille pourrait constituer une erreur stratégique majeure.