Biais de disponibilité ou quand votre instinct vous trahit

Le biais de disponibilité : la tentation de la réponse immédiate

Investir en bourse est un marathon, pas un sprint. Il n’existe pas de solution miracle : cela exige du travail, de la discipline, de la patience et de l’endurance. Pourtant, certains semblent avoir des astuces inédites. Georges Soros, l’un des plus grands financiers de l’histoire, aurait, selon la légende, possédé un pouvoir quasi surnaturel, digne d’un film hollywoodien. Il se dit qu’il ressentait une douleur intense dans le dos avant chaque grande chute des marchés. Avec un tel “super-pouvoir”, sa réactivité était immense.

Mais cette approche est-elle vraiment la bonne ? À quel point peut-on se fier à son instinct en matière d’investissement ?

En 1973, Amos Tversky et Daniel Kahneman ont mené une expérience fascinante. Ils ont demandé à des participants de juger si certaines lettres, telles que R, K, L, N, C ou V, apparaissaient plus fréquemment en première ou en troisième position dans des mots anglais.

La majorité des participants ont répondu : en première position. Pourquoi ? Parce qu’il leur était plus facile de se souvenir de mots débutant par ces lettres, comme “revenues“. Pourtant, en réalité, ces lettres apparaissent plus souvent en troisième position, comme dans les mots “decline” ou “include“.

Ce phénomène est connu sous le nom de biais de disponibilité : notre cerveau tend à privilégier les informations facilement accessibles en mémoire, souvent au détriment d’une analyse plus approfondie. Ce biais peut entraîner des réponses hâtives, imprécises, voire contradictoires avec nos véritables intentions. Une manière simple de se rappeler ce biais est de se souvenir du vieux dicton : “Il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler.” Prendre ce petit laps de temps pour réfléchir à une réponse permet de faire l’effort d’aller au-delà de la première pensée, souvent trompeuse.

Le biais de disponibilité en investissement

Dans le monde de l’investissement, ce biais peut être particulièrement ravageur, car il supprime tout esprit critique. Il conduit à accorder trop de poids aux arguments superficiels, immédiatement accessibles, au détriment d’une analyse plus approfondie des mécanismes en jeu.

C’est exactement ce qui s’est produit lors du dernier cycle de 2020-2021, notamment avec les crypto-actifs. De nombreux investisseurs particuliers se sont rués sur les monnaies numériques, croyant que la pandémie de COVID-19, couplée à une adoption anticipée de Bitcoin, constituerait des signaux haussiers indiscutables pour cette classe d’actifs.

Cependant, l’adoption n’a pas été aussi spectaculaire que prévu, et d’autres facteurs macroéconomiques ont altéré la dynamique des cryptomonnaies.
En effet, pour ces investisseurs, la montée en puissance du cycle d’adoption devait nécessairement entraîner une hausse mécanique des prix, car le nombre d’utilisateurs de Bitcoin connaissait une croissance fulgurante. Ils ont alors acheté à des prix élevés, sans anticiper le retournement du marché.
Leur biais de disponibilité les a amenés à une approximation optimiste de la réalité. Entre 2021 et 2022, de nombreux investisseurs ont vu leurs portefeuilles s’effondrer de près de 70%. Même aujourd’hui, alors que Bitcoin est bien au-delà de ses niveaux de 2022, rien n’est acquis pour la création de Satoshi Nakamoto, bien que l’adoption soit toujours en bonne voie.

C’est pourquoi il est essentiel d’éviter les raisonnements hâtifs. Chez Synapses, nous cherchons à nous éloigner autant que possible de ces biais cognitifs, en nous appuyant sur une analyse fondamentale rigoureuse, fondée sur des données factuelles et impartiales.

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