Bourse : la meilleure approche en 2026

La forte concentration du S&P 500 autour de quelques géants technologiques interroge de plus en plus les investisseurs.
Dans cet entretien, Christian Parisot, président d’Altaïr Economics, analyse les risques liés à cette situation, les limites de la gestion passive en Bourse et les pistes de diversification à envisager à l’approche de 2026.

Marchés américains : la concentration du S&P 500 est-elle devenue un risque pour les investisseurs ?

Vincent Bezault : Depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, la question de la concentration du marché américain revient régulièrement dans le débat. Aujourd’hui, cinq valeurs représentent près de 28 % du S&P 500. Peut-on encore considérer cette situation comme anodine ?

Christian Parisot : Cela pose un problème fondamental, car en finance, la diversification est un pilier essentiel de la gestion du risque. Elle permet de lisser les variations de portefeuille et de réduire les à-coups de valorisation. Or, lorsqu’on achète aujourd’hui le S&P 500, on investit essentiellement sur cinq à dix valeurs, et plus précisément sur les sept magnifiques.
Si l’on regarde les dix premières capitalisations de l’indice, elles représentent près d’un tiers du S&P 500. Cela entraîne une concentration extrême de la performance, mais aussi du poids de marché. On se retrouve avec un indice théoriquement diversifié, mais dont la dynamique repose sur un nombre très limité de thématiques microéconomiques.


Vincent Bezault : Le message est clair : attention aux ETF traditionnels non équipondérés si l’on veut profiter pleinement de la dynamique des marchés américains.*

Vincent Bezault : Certains diront pourtant que cette concentration est justifiée par le potentiel de l’intelligence artificielle et par un environnement de marché peu volatil, comme le montre le niveau bas du VIX, l’indice de la volatilité.

Christian Parisot : C’est précisément là que réside l’illusion. Un VIX faible donne le sentiment d’un couple rendement/risque exceptionnel, comme si l’indice montait sans danger. En réalité, cette apparente stabilité masque un risque croissant : celui de miser sur un nombre réduit de thématiques très spécifiques.
Plus la performance se concentre, plus l’investisseur prend un risque microéconomique, et non plus un risque sectoriel ou indiciel. Ce n’est ni bien ni mal en soi, mais il faut en avoir pleinement conscience.

Gestion passive, ETF et limites de la diversification

Vincent Bezault : Cette concentration a également des conséquences très concrètes pour les gérants d’actifs.

Christian Parisot : Absolument. Le poids de ces grandes valeurs est devenu tel que de nombreux gérants institutionnels ne peuvent plus suivre l’indice. Leurs règles de diversification leur interdisent de surpondérer ces titres à hauteur de leur poids dans le S&P 500.
Résultat : il y a mécaniquement moins d’acheteurs potentiels sur ces valeurs, et une partie des investisseurs professionnels est exclue de cette dynamique. C’est l’une des raisons pour lesquelles la gestion passive, via des ETF, surperforme souvent la gestion active ces dernières années.
Un gérant peut croire à l’intelligence artificielle, apprécier ces valeurs, mais il ne pourra pas répliquer la performance d’un indice dominé par cinq titres. Cela favorise les ETF, mais à terme, cette mécanique peut s’essouffler.

Vincent Bezault : On touche ici à un paradoxe : pour que la hausse se poursuive, il faut toujours plus d’acheteurs, alors même que ces valeurs deviennent de plus en plus chères.

Christian Parisot : Exactement. Plus la valorisation augmente, plus il faut de capitaux institutionnels pour soutenir la hausse. Or, ces capitaux ne sont pas illimités. À un moment donné, cette dynamique peut perdre de sa force, indépendamment même des fondamentaux.

Intelligence artificielle : valorisations élevées et nouveaux arbitrages

Vincent Bezault : Venons-en justement aux fondamentaux. Sommes-nous face à une bulle sur l’intelligence artificielle ?

Christian Parisot : Je ne parlerais pas de bulle. En revanche, il est indéniable que les niveaux de valorisation sont aujourd’hui très élevés sur certaines valeurs. Les marchés expriment davantage des craintes que de véritables doutes : des interrogations sur la capacité à atteindre les objectifs de croissance, sur la soutenabilité des rythmes actuels.
Prenons Nvidia. Sa marge brute a été exceptionnelle, son carnet de commandes très solide. Mais la concurrence s’intensifie, ce qui peut peser sur les marges. Il y a encore un an, le scénario semblait simple : visibilité totale, hausse quasi mécanique. Aujourd’hui, la situation est plus complexe.
Cela signifie que la thématique de l’IA évolue. Elle reste porteuse, mais elle appelle désormais des arbitrages plus fins au sein même du secteur.

Comment jouer la thématique IA en 2026 ?

Vincent Bezault : Concrètement, comment jouer l’IA dans ce nouveau contexte ?

Christian Parisot : Il ne s’agit plus de se concentrer uniquement sur cinq valeurs. Il faut réfléchir à la diffusion de l’IA dans l’économie. Certains éditeurs de logiciels pourraient tirer parti de l’IA pour améliorer leur offre et accroître leurs marges. Il faut aussi s’interroger sur les gains de productivité dans des secteurs comme la pharmacie, les médias ou les télécoms.
Par ailleurs, l’environnement macroéconomique redevient central : l’état du consommateur américain, l’évolution du cycle conjoncturel, et surtout les décisions de la Réserve fédérale américaine.
Si la Fed adopte une politique plus accommodante en 2026, cela ouvrira de nouvelles thématiques : immobilier, valeurs cycliques, rotations sectorielles. À l’inverse, un scénario de ralentissement économique impliquerait d’autres arbitrages.

2026 : le retour des indicateurs économiques et de la diversification

Vincent Bezault : Vous anticipez donc un changement profond de dynamique de marché.

Christian Parisot : Oui. En 2026, la performance devrait être moins concentrée. Les marchés seront plus sensibles aux indicateurs économiques, à la politique monétaire, aux décisions de Jerome Powell ou de son successeur. On sort d’une période où une thématique semblait gagnante quoi qu’il arrive.
Ce n’est pas une mauvaise nouvelle, mais cela implique de reprendre des risques assumés, de faire des choix, et de renouer avec l’analyse fondamentale.

ETF équipondérés ou stock picking : des alternatives crédibles

Vincent Bezault : Cela plaide clairement pour un retour du stock picking. Mais pour les investisseurs qui privilégient les ETF, existe-t-il une alternative ?

Christian Parisot : Oui : les ETF équipondérés. Depuis le début du mois de décembre, le S&P 500 équipondéré surperforme l’indice classique. En répartissant la performance sur un plus grand nombre de valeurs, on bénéficie davantage des rotations sectorielles et des réallocations d’actifs.
Donner le même poids à Nvidia, Microsoft et à des valeurs de plus petite capitalisation permet de capter des dynamiques que l’indice traditionnel dilue.
L’investisseur a donc deux options : revenir à une gestion active, ou conserver des ETF mais en changeant de logique, en anticipant une performance moins concentrée.

Vincent Bezault : Le message est clair : attention aux ETF traditionnels non équipondérés si l’on veut profiter pleinement de la dynamique des marchés américains.

Christian Parisot : Exactement. Si la Fed baisse les taux, les valeurs cycliques et les utilisateurs de l’IA devraient davantage bénéficier de la croissance. La performance ne viendra plus uniquement des grandes locomotives technologiques.

Vincent Bezault : En résumé, il est temps de changer de stratégie : stock picking, ETF équipondérés, et retour à la diversification, fondement même de l’investissement.

Christian Parisot : C’est précisément cela. La diversification reste la règle de base, même lorsqu’on a tendance à l’oublier.

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